« Lorsqu'un chevalier trouve ce septième sens et qu'il
parvient à le faire jaillir, il est capable de déployer une force
inimaginable. Le septième sens surpasse tous les autres et peut
faire naître une énergie incommensurable ! C'est le Cosmos ! »
- Je
m’appelle Sélène, fit la jeune fille en relevant la tête.
Son esprit enfin sorti du brouillard, elle fixait maintenant
intensément son sauveur de ses yeux bleu avec un air interrogateur.
Celui-ci la regardait un peu à la manière d’un extraterrestre,
avec des yeux ronds. Elle reprit :
- En
tant normal, quand quelqu’un se présente, l’autre fait de même.
- Euh…,
fut le seul mot ce qui traversa la barrière de ses lèvres sèches.
- Bon,
on verra ça plus tard. Tu sais où nous sommes ?
- Dans
le métro. On a traversé quelques stations déjà. Tu étais sonnée
et j’avais peur qu’ils nous rattrapent, alors j’ai sauté dans
le premier wagon qui venait.
- Très
bien. Sortons ici. Ça va ? Tu n’as pas l’air en forme.
- J’ai
mal à la tête, répondit-il en passant une main sur son crâne
douloureux.
Sélène se leva d’un bond et se précipita sur le quai de métro
dès que les portes s’ouvrirent. Pour quelqu’un qui s’était
fait tabasser quelques minutes plus tôt, pensa Myrien, cette fille
avait sacrément la pèche. Il dut presque courir pour rester à son
niveau. Sa marche était énergique et assurée, bien qu’elle n’ait
certainement aucune idée de l’endroit où ils étaient.
Retour à l’air libre. Sélène fonça droit vers le premier
panneau qu’elle trouva, sortit de sa poche un I-phone dernier cri
et se redirigea sur la gauche. Myrien n’y tenait plus.
- Où tu vas ? C’était qui ces hommes ? Pourquoi ils te
voulaient du mal ?
Sélène s’arrêta tout net et ficha son regard dans celui de
Myrien.
- Arrêtons
ce petit jeu. Je te remercie de m’avoir aidé face à ces deux là,
même si je ne suis pas sûre que tu m’aies vraiment aidé.
- Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda-t-il, sur la défensive.
- Je
veux dire que tu fais peut-être partie d’un joli petit coup monté
pour gagner ma confiance !
- Qu…
Mais qu’est-ce que tu racontes ? Je ne comprends rien à ce
que tu me dis !
Sélène parut prendre le temps de réfléchir. Elle jaugea Myrien du
regard, chercha quelque chose dans ses yeux, puis se décida à
reprendre :
- Soit
tu me dis la vérité, soit tu es un très bon comédien,
lança-t-elle.
- Je
penche plutôt pour la première hypothèse.
- C’est
aussi ce que dirait un bon comédien.
Myrien voulut se défendre mais la jeune fille ne lui en laissa pas
le temps.
- Tu
appartiens à quel groupe ?
- Pardon ?
- Qui
t’emploie ? Les sceptiques ou les fanatiques ?
Il voulait répondre la vérité, à savoir qu’il avait un petit
job alimentaire et n'appartenait à aucune secte, mais face au sérieux qu’affichait Sélène, il
choisit judicieusement de s’abstenir.
- Pour
tout te dire, je ne comprends pas du tout de quoi tu parles et
personne n’emploie mes services pour t’espionner. D’ailleurs,
j’ai encore ton carnet, celui qu’on a voulu te voler. Si j’étais
avec eux, je serai parti avec.
- Erreur.
Car toutes les informations de ce carnet sont codées et ça, ils le
savaient déjà. Une bonne raison pour me coincer dans une ruelle,
et faire pour que je me décide à tout expliquer à mon mystérieux
sauveur.
- Dis-moi,
tu ne crois pas que tu en fais un peu trop, là ?
Le ton de Myrien était tellement sincère que la situation sauta aux
yeux de la jeune fille. Elle éclata de rire. Un rire sans gène,
selon Myrien, qui remplissait l’espace et lui donnait du baume au
cœur. Elle répondit à sa question.
- Mais
tu ne sais vraiment rien, tu ne sais pas de quoi on parle en ce
moment ! C’est vrai ! (Il allait répliquer mais elle ne
lui en laissa pas le temps, encore une fois : ) Alors tu n’es pas un
chercheur ?
- Euh…
non.
- Et
tu ne sais pas ce qu’est le casque d’Orion, enchaîna-t-elle
d’un ton incrédule. Tu n’en as jamais entendu parler ?
Sélène restait étonnée par sa propre question et semblait
beaucoup s’amuser devant l’ignorance de son compagnon.
- Bon,
viens avec moi. Bientôt il pleuvra. Nous allons chercher un café
en terrasse.
Sans attendre une seconde de plus, elle redécolla et s’enfonça
dans une rue transversale.
Décidément, pensait Myrien en lui emboitant le pas, cette fille
avait un sacré caractère.
En la suivant, il repensa à la petite fille rousse de son enfance.
C’était déjà un sacré phénomène à l’époque. Et les choses
n’avaient pas l’air d’être allées en s’arrangeant. Après
cet échange, il n’y avait plus de place au doute, cette fille à
l’aura verte avec son air sauvage, c’était bien elle. Sélène.
Il commençait à pleuvoir lorsqu’ils s’arrêtèrent devant un
bistrot proposant quelques tables en extérieur et suffisamment
éloigné des grands axes passants. Ici, ils ne risquaient pas de
retomber sur les deux gorilles par hasard.
- Tu
souhaites vraiment qu’on s’installe dehors ? Il flotte !
fit Myrien.
Sélène s’installa sur la chaise mouillée, visiblement peu
dérangée par la pluie. Elle jeta un regard aux alentours et sourit
sans honte en regardant les passants courir pour rentrer chez eux ou
bien s’abriter sous les porches des bâtiments et dans les
magasins.
- Moi,
j’aime la pluie ! cria-t-elle sans prévenir, comme pour affirmer sa
différence avec les inconnus qu’elle jugeait depuis sa chaise.
Un sourire énorme était apparu sur son visage. Une véritable
satisfaction. C’était comme si elle lui criait sa fierté de se
sentir différente sur ce point bien précis.
Myrien avait soudain l’impression de voir Sélène pour la toute
première fois. Elle dégageait la même joie enfantine qu’il y a
seize ans, sauf qu’elle devait en avoir vingt et quelques et que
ceci dénotait totalement avec toutes les grandes personnes qu’il
avait eu l’occasion de rencontrer jusqu’à aujourd’hui. Malgré
son âge, elle ne devait pas dépasser son mètre soixante. Lui-même
d’ailleurs ne faisait pas beaucoup plus. Ses cheveux longs et roux
étaient trempés et tombaient en se collant jusqu’au bas de son
dos, sur ses épaules et sur ses joues, créant un véritable rideau
cuivré de part et d’autre de son visage et masquant ses oreilles.
Quelques mèches lui barraient également le front. La pluie coulait
aussi sur son visage, et sa peau pâle reflétait la lumière des
lampadaires et des néons du bistrot, colorant ainsi sa peau de
multiples teintes. Son nez lui faisait un peu penser à ceux des
grands fauves, légèrement plat sur l’arête supérieure, entre
les yeux. Couplé à ses yeux bleus et ses sourcils très fins, il ne
s’étonnait plus désormais de son silence dans le métro. Elle
dégageait une sorte d’énergie animale, très sauvage et pleine
d’attention, lorsqu’elle vous fixait dans les yeux. C’est cela
qui l’avait cloué sur place, comme maintenant.
- Bon,
passons aux choses sérieuses. Tu as toujours le carnet, n’est-ce
pas ?
- Il
est dans ma poche, fit-il en cherchant l’objet. (Quand il l’eut
trouvé, il le passa à Sélène en le protégeant de la pluie :
) Tiens !
- Bon.
Donc, tu ne sais rien de ces hommes en noir. (Myrien fit « non »
de la tête : ) Tu ne fais partie d’aucune équipe de
recherche. (Nouveau « non » de Myrien : ) Tu n’as
jamais entendu parler de l’antique objet sacré qu’on appelle le
casque d’Orion, ni des légendes qui en font mention.
- Ecoute,
je ne sais rien de tout ça alors si tu pouvais aller à
l’essentiel.
- Très
bien, conclut la jeune fille en ouvrant son calepin sous la pluie.
Tu n’auras donc rien contre le fait que je détruise ici et
maintenant toutes mes notes et donc le seul document indiquant
l’emplacement de ce casque, n’est-ce pas ?
Les fines pages se gorgèrent d’eau en quelques secondes. Myrien
eut le temps de voir des phrases et des schémas disparaitre sous
l’action de la pluie. Quand il essaya par réflexe d’empêcher
Sélène de détruire le document, elle l’écarta à bout de bras
puis le jeta sur une bouche d’égout où il reçu toute l’eau
accumulée par les gouttières des trottoirs, puis elle reposa son
regard sur Myrien.
- Donc
là, l’idée de perdre l’unique exemplaire existant donnant des
informations codées précises sur le lieu où serait entreposé le
casque perdu… Ca ne te fait vraiment ni chaud ni froid ?
- Mais
je ne sais même pas ce que c’est que ce casque !
Une fois de plus, elle le jaugea du regard.
- Bon,
j’ai décidé de te faire confiance. Pour tout te dire, je crois
que j’ai besoin de parler à quelqu’un qui n’a rien à voir
là-dedans. Tu veux savoir ce qu’est le casque d’Orion ?
- Etant
donné que quand je suis arrivé, je t’ai trouvé accompagnée de
deux gaillards vraiment pas commodes qui en voulaient à toi pour
obtenir ce carnet, alors oui, je suis curieux de savoir ce que cet
objet a de si spécial.
- Une
dernière question alors. Et je te conseille de bien répondre.
J’étais prise en étau entre deux chercheurs…
- Ils
avaient plus l’air de tueurs que de chercheurs si tu veux mon
avis, la coupa Myrien.
- Justement,
releva-t-elle. Des tueurs. Comment as-tu pu te débarrasser d’eux
alors que tu étais seul et sans arme ? J’ai aussi entendu un
coup de feu.
Myrien se souvint de l’homme des étoiles, de sa formidable
puissance qui s’était couplée à la sienne, puisant dans cet
Univers qu’il ressentait en lui-même. Mais que pouvait-il
lui répondre ? Déjà qu’elle ne le croyait pas lorsqu’il
restait logique.
Il la regarda, hésitant sur la conduite à adopter. Il n’avait
jamais été bon menteur, s’il mentait elle le saurait
certainement. Et si elle avait la moindre hésitation, il n’y avait
aucun doute qu’elle lui refuserait toute explication et que jamais
il ne la reverrait. Son regard lui donnait l’impression qu’elle
voulait le croire, mais qu’elle ne le ferait pas sans une très
bonne explication, ce qu’il n’avait pas. Il inspira amplement.
Que devait-il faire ? Jamais encore il n’avait parlé de ça à
quiconque mis à part sa mère. Décidé à resté sincère avec
cette fille, la seule personne qui le reliait à son expérience
d’enfance, il se lança :
- Lorsque
je t’ai vu te faire frapper et tomber à terre, j’ai eu très
peur pour toi. Je n’ai plus pensé à rien et je les ai frappés
de toutes mes forces. Sans que je puisse te l’expliquer
logiquement, chacun de mes coups ont porté comme si je frappais
avec une force surhumaine. Et lorsque le dernier était à terre, je
t’ai ramassé et nous sommes partis.
Il la regardait maintenant avec appréhension, attendant son
jugement. S’il avait été à sa place à elle, il serait parti
sans demander son reste.
- Intéressant,
dit Sélène qui n’avait pas du tout l’air étonnée. C’est
même très intéressant. C’est complètement invraisemblable ce
que tu me racontes mais tu le fais avec tellement de sérieux.
- Parce
que c’est sérieux et invraisemblable à la fois
- Oui…
et c’est pour ça que je te crois !
- Pardon
? demanda Myrien, plus surprit qu’il ne l’aurait pensé.
- Bien
sûr. Si tu avais été envoyé avec les deux autres, tu aurais
certainement préparé une explication bien plus logique à tout ça,
quelque chose du genre « je pratique les arts martiaux »,
un truc bien terre à terre, qui tienne la route. Et puis après
tout, rien ne promettait que je sois sonnée lorsque tu es arrivé.
En réalité j’aurai pu tout voir et ma question n’aurait jamais
eu l’occasion d’être posée.
Myrien restait bouche bée par le bon sens évident et la
perspicacité de sa compagne.
- Autre
chose ? demanda-t-elle en attrapant sa tasse de café, comme si
elle s’attendait à une révélation supplémentaire.
Il sauta sur l’occasion, mettant de côté ses pensées, comme un
enfant qui déclare sa flamme pour la première fois, inspira, et :
- Oui.
Tu es la fille que j’ai sauvée d’un accident de voiture, il y a
seize ans, et dont j’ignorais le vrai nom jusqu’à aujourd’hui,
farfadet.
Sélène ouvrit la bouche, ses yeux s’agrandirent quand elle
comprit l’information. Sa tasse glissa de ses doigts et partit à
la rencontre du sol.
Comment était-ce possible ?
***
Sélène reposa sa pinte de Guinness vide à côté des deux autres.
Elle capta le regard du serveur qui accourut prendre sa commande.
- Une
Guinness, s’il-vous-plait. Oui, une de plus, précisa-t-elle en
remarquant le regard ahuri du bonhomme. (Quand il fut parti, elle se
replaça droite sur sa chaise et s’adressa à Myrien : )
Pourquoi les français sont-ils toujours aussi surpris quand ils
voient une femme qui boit de l’alcool. C’est quand même dingue.
- Peut-être
parce que c’est ta troisième pinte en moins de deux heures et que
tu es toujours fraîche comme à ton arrivée ?
Sélène ne souligna pas le propos et revint à leur conversation.
- Bon,
est-ce que tout est clair maintenant pour toi ?
Myrien se cala davantage dans le creux de son banc. Le temps avait
nettement fraîchi il y a un environ une heure de cela et ils étaient
partis s’abriter du froid à l’intérieur du bistrot. Là, Myrien
et Sélène avaient rediscuté de leurs souvenirs d’enfance et de
ce fantastique phénomène il y a seize ans, lorsqu’ils s’étaient
rencontrés. Myrien n’omit rien de cet évènement et alla même
jusqu’à lui révéler ses secrets sur l’homme étoilé et ce
qu’il appelait pour lui-même, l’Univers. Elle l’avait écouté
parler et à aucun moment ne s’était moquée de lui. Au contraire,
loin de réfuter tout en bloc, elle lui posait des questions
pertinentes, lui demandait des précisions, cherchaient à comprendre
le phénomène et plusieurs fois Myrien dut faire appel à tous ses
souvenirs et chercher les mots exacts pour lui décrire ses
sensations.
Il n’avait ressenti l’univers qu’en sa présence à elle et ne
voulait donc rien lui cacher. Manifestement, elle voulait tout
savoir.
- Mais
quand tu dis « puissant », tu veux dire à quel point ?
avait-elle demandé.
- Le
meilleur exemple serait de te montrer ceci, avait-il répondu en
sortant de sa poche la douille de pistolet.
L’intérêt de la jeune fille n’avait plus eu de limites à
partir de ce moment et Myrien se demandait comment il avait fait pour
garder autant de secrets pour lui. Il avait parlé en flot continu
pendant longtemps jusqu’à enfin vider son sac.
Ensuite, ce fut à lui de poser des questions et elle lui résuma
autant qu’elle le put l’histoire du casque d’Orion en
commandant des pintes de Guinness.
C’était maintenant à lui de résumer ce qu’elle lui avait
appris.
Il se racla la gorge.
- Le
casque d’Orion est une relique sacrée qui daterait de l’antiquité
grecque. C’est un casque réalisé vraisemblablement en bronze qui
aurait appartenu au guerrier et chasseur mythologique Orion. D’après
la légende, Orion serait né grâce aux pouvoirs conjigués trois
divinités, Zeus, Hermès et Poséidon, ce qui expliquerait sa force
surpuissante.
- En
fait, on dit que de ses pieds, il pouvait entrouvrir la terre et
qu’avec ses mains, il fendait le ciel, précisa Sélène. Enfin,
selon certains textes. Dans d’autres, il aurait un arsenal
multifonction digne de la super-ceinture de Batman !
- Et
il est dit, continua Myrien pour ne pas perdre le fil, ou du moins
certains croient, que celui qui portera le casque à son tour
disposera de la puissance dévastatrice du héros mythologique.
- C’est
pour cela que de nombreuses équipes de chercheurs se sont lancées
dans la quête lorsqu’une preuve potentielle de l’existence du
casque a été déterrée lors d’une fouille archéologique…
- Non
loin de plusieurs cratères météoritiques, mais sans météorite
visible…
- Ce
qui corrobore l’hypothèse d’une force surpuissante, conclut
Sélène.
- Et
quel était cette preuve qui a poussé tant de scientifiques dans la
course ?
- Une
chimère.
- Pardon ?
- C’est
comme ça que nous l’avons nommé. Nous le classons dans le grand
livre des mystères, des découvertes archéologiques non élucidées.
Les sept cratères, disposés comme ils le sont en une proportion
calculée par des scientifique et jugée exacte au millimètre près,
forment une réplique fidèle à cent pour cent de l’emplacement
des trois étoiles figurant la ceinture de la constellation d’Orion
et de ses quatre autres étoiles.
Myrien ne comprenait pas bien.
- C’est-à-dire ?
- C’est-à-dire
que proportionnellement parlant, leurs diamètres, leurs
emplacements et espacements les uns par rapport aux autres, leurs
profondeurs, tout concorde avec les sept étoiles formant la fameuse
constellation d’Orion, la constellation la plus connue sur la
planète et la plus visible à l’œil nu dans l’hémisphère
nord avec la grande Ours.
- C’est…
impressionnant, fit Myrien qui s’avouait totalement largué. Et en
quoi c’est une preuve de l’existence du casque ?
- Il
n’y a pas de preuve tangible de son existence. Seuls certains
chercheurs comme moi s’intéressent à ce casque et considèrent
ces cratères comme des preuves.
- Mais
en quoi ces trous signifieraient que le casque existe et qu’il
procure autant de puissance ?
- Il
y a au moins trois bonnes raisons à cela. La première c’est que
quelqu’un dans ma famille le cherchait et y a consacré toute sa
vie avant de disparaître sans laisser de trace. Ca, c’est ma
première raison.
- Je
suis désolé, s’excusa Myrien qui ne savait plus où se mettre.
- Pas
grave. Ce n’est pas la seule raison. La deuxième, c’est que
parmi les chercheurs, il y a des hommes très influents qui se
tiennent dans l’ombre et qui seraient prêt à tout pour obtenir
cette relique. Tu en as eu la preuve cette après-midi et moi, je
trouve que c’est une très bonne raison pour croire que le casque
existe.
- Très
bien, si des gens y consacrent suffisamment d’attention pour
envoyer des tueurs plutôt que des chercheurs, c’est qu’ils
tiennent vraiment à l’obtenir. Ça se tient. Et le troisième
argument ?
- On
a retrouvé un morceau de métal à une certaine distance des
cratères. La datation au carbone 14 a permis d’émettre une
hypothèse : celle que l’objet daterait de plusieurs milliers
d’années. Sa confection remonte à 8000 à 12000 avant Jésus
Christ et sa méthode de fabrication nous est inconnue.
- Tu
plaisantes ?
- J’ai
l’air de plaisanter ? s’exclama Sélène. Il y en a des tas
de mystères archéologiques comme celui-ci. Les pyramides d’Egypte
par exemple, avec ces milliers de blocs de pierre pesant jusqu’à
400 tonnes et soi-disant tirés par des esclaves et des éléphants
avec des cordes sur des rondins de bois dans une Egypte qui a perdu
ses forêts depuis plusieurs milliers d’années. Savais-tu que la
meilleure grue au monde actuellement en service ne peut pas soulever
de bloc dépassant les 200 tonnes ?
- Euh…
non, je l’ignorais.
- Et
bien voila. Qu’on ne vienne pas me dire qu’il n’y a pas de
mystère là-derrière. Et je ne parle pas des barres de fer en
forme de « T » coulées entre les blocs parfaitement
cubique des pyramides d’Amérique du sud pour les maintenir
parfaitement unis ! Ces bars de fer ont été coulées à une
époque où ce peuple ne connaissait ni la fonte du métal à ce
niveau d’expertise, ni même l’utilisation de la roue !
- D’accord
j’ai compris. Merci, je ne voulais pas douter de toi. Donc ce
morceau de métal selon toi….
- …appartiendrait
au casque d’Orion, c’est exacte. Même sa composition nous est
inconnue. Il résiste à des températures extrêmes et dégage un
champ électromagnétique, à l’instar de certaines technologies
modernes et…
- Et
des êtres vivants, conclut Myrien, les yeux dans le vague.
Sélène rit de surprise.
- Désolé
Myrien, tu es peut-être extraordinaire quand tu dois sauver une
demoiselle en détresse, mais les humains ne dégagent pas de champ
électromagnétique. Ca se saurait.
- Je
peux t’assurer que si.
- As-tu
une preuve de ce que tu avances ?
- Et
toi pour les pyramides ?
Sélène était piquée au vif.
- Moi
c’est du bon sens. Ce n’est pas pareil.
- Bien
sûr que si. Et je vais te le démontrer. C’est très simple, tout
courant électrique génère un champ électromagnétique. La moelle
épinière est parcourue de minuscules courants électriques. Donc…
- Donc
le corps dégage un champ. Bon, j’abdique pour cette fois. Mais
j’attends de vérifier ça physiquement.
- Ok.
Et maintenant ?
- Maintenant….
Sélène l’observa encore une fois, comme cet après-midi.
Cherchant une information dont elle seule savait la teneur. De son
côté, Myrien se laissa observer, passif, conscient que ceci
constituait déjà un test de la part de sa compagne scientifique. Au
fond de lui-même, il savait très bien ce que ce moment signifiait.
Elle ne lui avait certainement pas révéler tous ces détails pour
rien. Peut-être demanderait-elle son aide ? Et si elle ne le
faisait pas, devait-il la lui proposer ?
Les lèvres de la jeune fille remuaient mais Myrien n’entendait
pas, son ouïe oblitérée par le flot de ses pensées. Il se
concentra davantage et reprit le contrôle de ses sens.
- C’est
là que je te propose de me suivre, répéta-t-elle.
- Pardon ?
fut le seul son qu’il put formuler.
- Décidément,
c’est un vrai toc de t’excuser on dirait.
Myrien se sentit rougir. Sélène reprit.
- Vu
ce qui est arrivé aujourd’hui, je pense que quelqu’un en plus
dans mon groupe de recherche ne serait pas de trop. Je te propose un
travail.
- A
moi ? Mais… contre de l’argent en plus ?
- Bien
sûr ! Tout travail mérite salaire, c’est bien normal. Tu
vas pas travailler pour mes beaux yeux !
- Quand
tu parles d’un groupe de recherche, tu veux dire combien de
personnes ? demanda Myrien afin d’éluder la dernière
remarque de Sélène.
- Nous
verrons ces détails plus tard. Est-ce que tu es partant ?
Il prit la peine de réfléchir un instant, pour la forme et histoire
de se donner bonne conscience. D’un côté, il y avait son ex, qui
allait lui envoyer des messages sur son portable et le harceler, il y
avait son petit boulot misérable dans un supermarché minable, et
bien sûr toutes les perspectives d’une vie monotone à regretter
de ne pas avoir accepté. De l’autre côté, il y avait la fille de
son enfance qui lui proposait de partir à l’aventure en quête
d’une relique mystérieuse dans un pays inconnu, et rémunéré. En
plus, elle était agréable et il lui avait parlé de son secret.
Dans la même journée, il l’avait également sorti d’une très
mauvaise situation et s’était à nouveau senti puissant comme les
étoiles. Fallait-il y réfléchir davantage encore ?
- Je
suis avec toi !
- Super.
Nous partons demain. Tu sais où dormir ?
Par réflexe, Myrien baissa son regard vers son sac… manquant. Il
l’avait oublié sur la terrasse durant l’après-midi, son argent,
ses clefs et son portable avec. Non, il ne savait pas où dormir ce
soir, ni comment payer la note, ni même comment s’habiller demain.
Il posa sur Sélène un regard désemparé qui devait ressembler à
celui d’un chien battu. Ce devait être très convainquant car elle
rit à gorge déployée sans se soucier des autres clients attablés
plus loin.
- Bon,
c’est plié. Je t’emmène chez moi. Tu as une copine ?
- Euh...
Je… euh… non.
- Bon,
n’espère même pas me frôler ce soir, je dors avec un couteau en
céramique !
Il se le tint pour dit.
***
En un lieu tenu secret.
Dans une vaste salle de pierre brute sobrement décorée de quelques
tentures, un homme se tenait caché dans l’ombre d’un des
nombreux piliers. Depuis son immense trône, la silhouette casquée
d’un heaume d’or repéra immédiatement cette présence familière
et son attention se reporta sur elle.
La présence dissimulée dans l’ombre prit la parole avec une
véritable déférence.
- Kalyaste
du signe caché du Serpentaire, au rapport, dit-il pour se signaler.
- Parle,
mon ami.
La voix efféminée et douce de la personne assise sur l’antique
trône n’enlevait rien au respect que ressentait Kalyaste lorsqu’il
lui adressait la parole.
- Il
semblerait qu’un imprévu ai eu lieu.
- Je
t’écoute.
- L’un
des chercheurs aurait découvert l’endroit où se trouve le casque
de la constellation d’Orion, perdu depuis des millénaires, comme
le reste.
- Oh ?
fit la voix efféminée, sincèrement surprise. Et quel est ce lieu,
Kalyaste ?
- Il
m’est impossible de l’apprendre pour le moment, Ma… (Il se
retint à temps et ne commit pas l’erreur de terminer sa phrase).
Mais je compte surveiller cette personne de très près afin de
récupérer l’objet en question.
- Kalyaste.
Toi, le seul qui est autorisé à recourir à toutes les bassesses
pour accomplir tes missions, tu te refuserais à user de ton
pouvoir ?
- Je
ressens un potentiel chez cette personne. Je préfère garder un œil
dessus pour le moment. De plus…
- Qu’y
a-t-il, Kalyaste ? Encore une nouveauté ?
- Elle
est accompagnée d’un jeune homme depuis aujourd’hui. Il s’est
éveillé au septième sens cette après-midi lorsque la gamine
s’est fait agresser.
La silhouette casquée resserra sa prise sur les accoudoirs et
s’avança sur son siège.
- Que
dis-tu ? En es-tu certain ? Parfois il peut s’agir d’un
éveil ponctuel, un coup de chance qui n’arrive qu’une fois dans
une vie...
- Son
corps dégage un cosmos, j’en suis certain. Il a brûlé pendant
plusieurs secondes puis s’est éteint partiellement, mais il
pourrait l’intensifier à nouveau sans même en avoir conscience.
La silhouette assise sur le trône réfléchit un instant.
- J’aimerais
que tu oublies toutes tes autres activités pendant quelques temps
et que tu suives ces deux jeunes gens de près. Si ce que tu dis est
vrai, alors tu n’es pas le seul à l’avoir ressenti. Ils
pourraient très bien décider de les supprimer sur le champ, ou
pire, de les embarquer avec eux. Nous sommes trop affaiblis pour
laisser croître les rangs de nos ennemis.
- C’était
là ma pensée, grand Pope.
J'aime Sélène et ses Guinness.
RépondreSupprimerA part ça, le suspens est toujours là et c'est toujours un plaisir de lire le casque d'Orion ! Bravo.
Merci à toi,
SupprimerSélène est très attachante (avec ou sans Guinesse) et je peux te dire qu'elle n'a pas fini d'en faire baver à son entourage.
Bravo !
RépondreSupprimerJ'ai hâte de lire la suite.
Merci beaucoup, j'espère donc que la suite va te plaire =)
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